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28 Les armées romaines en Gaule à l’époque républicaine Nouveaux témoignages archéologiques sous la direction de Michel Reddé Le Lampourdier Un camp romain républicain témoin de la bataille d’Orange (6 octobre 105 av. n. è.) ALAIN DEYBER, YAHYA ZAARAOUI, LOÏC BUFFAT HISTORIQUE ET CONTEXTE DES RECHERCHES (AD) Il s’en est fallu de peu que cet article ne fût jamais publié, tant le site dont il traite est passé au bord d’une catastrophe majeure qui le rongeait depuis un demisiècle, dans une indifférence quasi-générale. C’est en 1986 que nous avons eu connaissance de l’existence du site du Lampourdier et que, d’emblée, nous l’avons associé à la célèbre bataille d’Orange du 6 octobre 105 av. n. è., confirmant ainsi l’analyse sommaire qu’en avait faite D. Boisse, à partir des découvertes d’artefacts effectuées par divers intervenants, une quinzaine d’années auparavant (Boisse 1986, avant-propos ; Deyber, Luginbühl 2018, p. 155). Ce site aurait, semblet-il, été découvert au début des années 1970, mais les conditions de son invention sont quasiment impossibles à reconstituer avec fiabilité. La vulgate locale que nous avons recueillie voudrait que ce soit fortuitement, et à l’occasion de parties de chasse auxquelles participaient des érudits locaux ; parallèlement, cette découverte, pourtant si importante pour l’Histoire, ne fit jamais l’objet d’aucune déclaration réglementaire aux autorités de l’État, ce qui fait sérieusement douter de l’exactitude et de la sincérité de cette version. En revanche, la chasse au gibier a très rapidement cédé la place à la chasse au trésor et le site a été pillé sans vergogne pendant des années, sans aucune autorisation, ni des propriétaires, ni de l’État, par des dizaines de personnes, jusqu’en 2014. Cette année-là, nous avons pris la mesure exacte du désastre et avons immédiatement procédé au signalement des faits délictueux au conservateur régional de l’archéologie de Provence-Alpes-Côte d’Azur, X. Delestre. Il fut ainsi mis fin à cinquante années de pillage éhonté de ce site archéologique et historique majeur, où disparurent à jamais des structures rares et de précieux artefacts qui auraient permis de reconstituer, un peu mieux que nous ne pouvons le faire, l’histoire d’une des plus grandes batailles du monde romain occidental (Deyber, Luginbühl 2018, p. 156-157). Des mesures drastiques ont immédiatement été prises par l’administration, et les premiers résultats positifs ont été enregistrés dès 2015, grâce à une action interministérielle concertée avec des chercheurs indépendants autorisés, des universitaires et des opérateurs agréés en archéologie (Delestre 2016). Depuis lors, des réseaux ont été démantelés et plusieurs procédures judiciaires ouvertes. Les sanctions diverses, généralement lourdes, ont contribué fortement à stopper le pillage. Les autorités sont parvenues à récupérer une partie de ce qui avait été découvert, étant observé que la majorité a bien évidemment été vendue sur les marchés numismatiques, les foires expositions et les forums ou ventes en ligne, au fil des cinquante années qui ont précédé. Les enquêtes ne sont pas terminées, la tendance devrait donc se poursuivre ; nous émettons le souhait qu’elle mette un terme définitif à ces agissements frauduleux et qu’elle permette de récupérer une partie du pillage, dont l’impressionnant inventaire dressé par D. Boisse donne la mesure (Boisse 1986, p. 31-68). Après 1986, quelques recherches archéologiques autorisées avaient bien été entreprises sur le site et elles avaient permis de recueillir de nombreux artefacts antiques (Blaison 1991 ; Hasler 1992), mais le pillage n’en cessa pas pour autant et il continua sans REDDÉ (M.) dir. — L’armée romaine en Gaule à l’époque républicaine. Nouveaux témoignages archéologiques. Glux-en-Glenne : Bibracte, 2018, p. 19-44 (Bibracte ; 28).